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©Jasserie, Hautes-Chaumes|David Frobert

Patrimoines naturels Sur les traces du colporteur des jasseries

Sur les pas d’un marchand ambulant

Il s’en est fallu de peu que je reste là-haut. Arriver au col des Supeyres et marcher dans les pas du colporteur des jasseries, c’est arrêter en effet la course du temps et les petits tracas du quotidien, au milieu d’une nature majestueuse. La randonnée du colporteur des jasseries est alors l’une des balades les plus marquantes du Parc Naturel régional en Auvergne. En Livradois-Forez, à cheval sur les monts du Forez, dans le Puy-de-Dôme, à quelques petits kilomètres de Prabouré. Elle est ici, cette randonnée familiale adaptée au plus grand nombre d’entre nous autres, sportifs mais aussi gourmands. En effet le dénivelé tout au long du parcours est peu élevé, si ce n’est sur de courtes distances, vite parcourues. De plus, la variété des milieux naturels offre de belles découvertes.

Au départ du col, nous traversons de grandes prairies à l’herbe rase. Puis, après quelques passages sous les arbres, les tourbières sont reconnaissables. Ensuite, viennent les champs d’estive, au plus près des jasseries. Avant de cheminer sur un étroit chemin dans une hêtraie buissonneuse. Le temps se suspend ainsi, sur les traces du colporteur. En effet, des panneaux en lave émaillée jalonnent le parcours. Ils racontent une histoire, rapportée par ce marchand ambulant. L’imagination bat son plein sur les monts du Forez. Mais ce qui est le plus propice à la déconnexion, c’est le silence relaxant qui enveloppe les Hautes-Chaumes.

Une vie en altitude à pleins poumons et en pleine nature

En partant de Thiers et en direction d’Ambert, il faut prendre la D906, le nerf routier du Livradois-Forez. Valcivières est indiquée peu après la traversée de Vertolaye. Puis des panneaux bien pratiques orientent vers le col tant attendu. La montée en voiture se fait bien. C’est d’ailleurs, un des cylo-cols réputés du Livradois-Forez. Cependant, au vue de l’allure bien pentue de la route, je suis bien contente d’être véhiculée, sans pédalier. Le réveil a été dur ce matin, il est déjà presque 11 heures lorsque j’arrive au col des Supeyres. Ce dernier, juché sur les monts du Forez à 1366 mètres talonne de peu son comparse le col du Béal (1390 mètres).

Mon conjoint, mon chien et moi ne sommes pas les seuls à avoir eu l’idée de cette randonnée. Une bonne quinzaine de voiture attend, ainsi garée sur le parking jouxtant le chalet des Gentianes. Bien qu’une odeur appétissante s’élève à proximité du gîte d’étape, il est encore un peu tôt pour déjeuner. Je pars en exploration faire quelques photos. L’air est vif, je savais bien qu’il fallait se couvrir. En Auvergne, à plus de 1000 mètres d’altitude, il ne faut jamais oublier une à deux couches de vêtements en plus.

Après l'effort, le réconfort

Le chalet des gentianes semble convenir alors parfaitement pour trouver confort et chaleur en cette journée du mois de janvier. L’auberge d’altitude est déjà pleine pour le déjeuner. La réservation à l’avance, conseillée sur le site, est plus que justifiée. En effet, au chalet des Gentianes, le « fait maison » apporte saveurs et bonheur dans l’assiette. Le menu du jour se compose ainsi d’une entrée fraîche et/ou d’un plat principal revigorant et/ou d’un dessert réconfortant. Le chef s’active en cuisine. La cheffe de l’établissement m’accueille avec un grand sourire. Toute la salle répond à mon « bonjour ». Le feu crépite dans la cheminée. Oui, vraiment, le cadre et les belles personnes qui l’animent apportent tout de suite chaleur et réconfort. Et le déjeuner est délicieux. Les plats copieux et bien présentés réchauffent alors le cœur et le corps qui se préparent à la randonnée.

Une randonnée jalonnée d’histoires de nature contées  par le colporteur de jasseries

Je pars voyager avec mon chien, et mon conjoint, sur les Hautes-Chaumes. Les papilles satisfaites et la motivation gonflée à bloc, nous voilà partis en pleine nature sur le sentier du colporteur des jasseries. La balade de niveau facile, ne fait que 9,2 kilomètres et a peu de dénivelé (257 mètres). Je cherche alors le premier balisage emblématique de ce sentier de randonnée : un petit lapin bondissant, dessiné sur un carré de lave émaillée. Le voilà ! Blanc et surplombant un poteau en bois, il se découpe bien dans le paysage. À proximité, un premier panneau souhaite la bienvenue et présente le tracé de la balade. En effet, cette dernière est jalonnée de 7 pauses parmi lesquelles : le colporteur, les cabanes, le chemin, les saisons, sur la lande, dans le pré ou encore, la Fourme.

Mes pieds foulent l’herbe grasse des Hautes-Chaumes pour la première fois.
Ils s’enfoncent légèrement dans le sol gorgé d’un humus ancien. La petite randonnée est d’autant plus facile que cet « effet rebond » sous le pied atténue la sensation de gravité de nous-autres, terriens. Par-ci, par-là, de la neige décore le sentier. Je réalise d’ailleurs que je n’ai jamais fait de randonnée en raquettes. Mes chaussures de marche glissent légèrement sur la neige givrée. Le manteau blanc neigeux n’est, tout de même, pas assez épais pour envisager maintenant une balade avec des raquettes. Au deuxième panneau, je fais la connaissance du colporteur qui raconte, sur de la lave émaillée, sa vie de marchand ambulant de jasserie en jasserie. « Je vends livr’ et potions pour vous r’donner du cœur » chantait-il.

Le colporteur vendait des draps, des tissus, du fil, des rubans et de la quincaillerie… Toute une marchandise utile et lourde qu’il portait jusqu’aux « fermes d’en haut ». Il nous accompagne tout au long du chemin, à travers ces panneaux qui nous apprennent de nombreuses choses sur la vie dans les Hautes-Chaumes. À la pause suivante, un panneau ne manquant pas d’humour présente la ferme des Supeyres. Nous sommes à 1300 mètres d’altitude. La vue est Supeyres(be). Je poursuis paisiblement sur le chemin en direction de Malmotte.

Une balade sur les Hautes-Chaumes en pleine déconnexion

Mon conjoint et mon chien ont pris un peu d’avance. Je suis en plein nature, en bordure de forêt. Seul le bruit de mes pas rompt le silence ambiant. Ces moments précieux de calme sont trop peu nombreux au quotidien. Au loin, un ruisseau s’écoule doucement. Une cloche de vache tinte. Un petit passereau s’envole d’une branche d’un sapin. L’air est humide et frais. La déconnexion est bien au rendez-vous. Je pense quelques instants à ce colporteur qui parcourrait ce trajet de nombreuses fois par mois. Il devait être bien sportif pour cheminer ainsi chargé sur les Hautes-Chaumes. Mais le plaisir de la randonnée, c’est aussi savoir faire le vide dans sa tête. Pour arrêter ainsi la course du temps et profiter pleinement du moment présent. « Le passé est passé » comme le chante une célèbre reine des neiges.

Le sentier s’enfonce doucement dans la forêt. Sur le versant nord de la randonnée, la végétation est bien différente. Le lichen accapare les arbres et donne un petit côté fantastique à cette forêt qui était là, bien avant nous. À quelques pas du sentier, une bergerie abandonnée, dissimulée sous les arbres, éveille ma curiosité. Elle n’a plus de toit. J’entre prudemment dedans en suivant un tracé naturel : je ne suis pas la seule à être curieuse. À l’intérieur, une petite pièce de détache du logis principal. Un abreuvoir est encore visible dans cette niche presque dépourvue de fenêtre. On entendrait presque le bêlement de petits animaux serrés les uns contre les autres pour se chauffer.

Quelques temps avant la boucle finale, je découvre le sentier saupoudré de neige. En cette fin du mois de janvier, nous ne l’avons pas encore beaucoup vue dans le Livradois-Forez. Ce petit chemin au milieu des bruyères rappelle que nous sommes quand même en hiver. Mais mon inspiration poétique vole en éclat alors que mes pieds glissent sur cette poésie piétinée : il est temps de rejoindre le col des Supeyres.

De plus, le dernier panneau du sentier du colporteur des jasseries parlait de la fourme d’Ambert, cette autre merveille de la nature… Le meilleur pour la fin. À ce propos, n’est-il pas l’heure de goûter à cette fameuse fourme d’Ambert, fruit des Hautes-Chaumes ?

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